lundi 21 janvier 2008

Thétys, la mer primordiale

Pour MFI (RFI agence) (1993)

C'était un continent. Il y a 180 millions d'années, les terres émergées de notre planète se concentraient en un monde intégral et unique, la Pangée. Ce n'était en fait pas la première fois dans l'histoire de la planète, puisque le lent mouvement de dérive des terres à la surface du magma en fusion du sous-sol avait déjà donné lieu à de pareils regroupements, à plusieurs reprises à travers les 4 milliards d'années de l'hitoire géologique de la Terre. La différence, c'est que cette dernière retrouvaille des rocs concerne l'homme moderne que nous sommes : elle a été le point de départ de tous les mouvements qui ont conféréré à notre planète son visage d'aujourd'hui, celui que nous connaissons.

Mais l'événement scientifique, c'est que les chercheurs se sont concentrés pour la première fois sur une mer disparue, et non pas sur le seul sort du continent géant. La Téthys, la mère de nos océans actuels est en fait un mystère palpitant. Non seulement elle ornait la Terre d'une perle bleue au milieu des terres émergées (la vaste mer extérieure, ceinturant elle la Pangée a été nommée Panthalassa), mais par sa présence, elle a creusé le lit de quelques merveilles. Comme les gisements de pétrole que nous exploitons aujourd'hui.

Rien de surprenant donc, à ce que ce soient des groupes pétroliers comme Elf, Total, Shell, et BP qui aient participé au travail de traque de cette mer géante, par les chercheurs de l'Institut français de recherche pour l'exploitation de la mer (Ifremer). car qui connaît l'emplacement de cette mer pourra chercher plus facilement des indices de gisements inconnus d'hydrocarbures...
L'affaire commence voici 250 millions d'années. Le continent alors unique, la Pangée recommence à se disloquer sous les efforts du manteau sous-terrain de la planète. Il faut dire que cela s'agite là-dessous. Les besoins d'évacuation de la chaleur par le sous-sol poussent en permanence les dernières couches du sol, celles qui sont en contact avec l'extérieur. Les obligeant à se mouvoir, un peu à la manière de la peau qui se forme sur du lait mis à chauffer dans une casserolle.

La Pangée se lézarde. Les futures Europe et Amérique du Nord dérivent vers le nord, tandis que l'Afrique et l'amérique du sud, soudées à l'Inde et l'Australie, plongent vers le sud.

Il y a 150 millions d'années, la mer fait irruption entre les deux régions dissidentes, occupant la place disponible. Le scénario continue son lent déroulement.

Il y a 65 millions d'années, c'est cette fois du nord au sud qu'une faille géante se dessine. Amérique du sud, Afrique, Inde et Autsralie sont des îles , parties à l'aventure dans diverses directions. Des radeaux libres, guère pour longtemps. Les collisions qui les cimenteront à d'autres continents-navires sont inévitables dans ce chaos de roches à la dérive.

Il y 25 millions d'années, la période des grandes collisions commence. En Amérique, où le Sud télescope le Nord avec l'apparition d'un isthme, l'Amérique centrale, mais aussi en Afrique, dont la remontée a finalement permis la création de la Méditerrannée, et du même coup, des montagnes de Turquie, de l'Atlas, du Sinaï, et des Alpes.

Plus à l'est, l'Inde a percuté de plein fouet le plaque eurasienne, élevant dans les airs le plus formidable édifice de la planète : l'Himalaya.
L'Australie, pour sa part, poursuit son bonhomme de chemin sans rencontrer personne dans ce qui demeure le plus beau souvenir de la mer originelle : l'Océan Pacifique.

Que l'on ne s'y fie pas. Pour pouvoir reconstituer ce scénario, il a fallu abreuver les ordinateurs de flots de milliers de données recueillies depuis plus de 100 ans par les géologues. Et affrèter des navires pour aller forer au fond des océans, là ou un doute subsistait. Mais aussi recueillir dans les grands fonds des radiolaires, squelettes de petits organismes marins, afin de voir à quelle profondeur ceux-ci se trouvaient quand ils sont morts. Un indice déterminant pour connaîre l'allure du fond des mers à une période donnée.

Des chercheurs comme Luc Emmanuel Ricou, du Centre National de la Recherche Scientifique ont également utilisé les boussoles naturelles que la roche enferme en son sein. La solidification de la lave vomie par failles et volcans à une époque précise immobilise de petist cristaux d'oxyde de fer, qui indiquent le nord à ce moment là. Une fois la piere refroidie, les cristaux sont pris au piège, immobilisés et indiqueront à jamais la même direction. Il ne reste plus alors aux scientifiques qu'à lire ces "boussoles-mémoire" pour savoir dans quelle direction se trouvait le nord magnétique de la Terre en ces temps reculés.

Pour ceux qui seraient nostagiques de cette grande mer ceinturant la planète, patience. Un autre regroupement général des continents pourrait avoir lieu. Dans quelques 200 millions d'années. Une bagatelle, à l'échelle de la Terre...

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